Travailler la porcelaine, c’est apprendre à apprivoiser la déception — pas à la fuir, mais à lui faire une place, juste à côté de l’espoir.
Il y a d’abord cette incertitude familière du four, ce suspense qui précède l’ouverture, où chaque pièce est un secret bien gardé, encore tiède. Je m’étais déjà habituée aux caprices des glaçures, à ces couleurs promises qui changent d’avis sous l’effet du feu… Mais les fissures, les craques, les bris nets ou sournois, eux, je les découvre encore avec un pincement au cœur.
Ah, la porcelaine ! Belle et rebelle, fine comme une peau d’ange, mais si prompte à se fendre sans prévenir. Une vraie petite délinquante à l’allure sage, qui vous laisse parfois plus de miettes que de réponses.
Il y a ce moment précis — ce tout premier regard après la cuisson finale — qui peut faire chavirer le cœur : la joie pure d’un miracle intact… ou la stupeur silencieuse d’une pièce en morceaux. Chaque ouverture de four est un battement de cœur suspendu, une émotion brute. C’est parfois l’euphorie, parfois un deuil discret.
Et pourtant, même dans l’échec, il y a une étrange beauté. Ces éclats racontent une histoire. Celle d’un geste, d’un rêve, d’une intention qui, même brisée, a eu lieu.



